LE CHÂTEAU D'IF

LE CHÂTEAU D'IF


Une histoire légendaire

Cet îlôt rocheux entra dans l'histoire lorsqu'en 49 av. J.-C Jules César y ancra sa flotte avant de faire le siège de Marseille où les troupes de Pompée s'étaient retranchées.

En 1516, l'île hébergea pour quelques semaines un rhinocéros indien que le roi Manuel Ier de Portugal, dit "le Magnifique" avait reçu d'un prince Hindou, et qu'il souhaitait offrir au Pape Léon X. Tout Marseille s'empressa d'aller admirer le mystérieux animal inconnu en Europe.

un rhinocéros indien

En pèlerinage à la Sainte-Baume, le jeune François Ier auréolé de sa victoire de Marignan, entendit parler de cette curiosité et s'invita pour voir la bête. Fasciné par le panorama, il s'intéressa davantage à l'avantage stratégique qu'offrait le site qu'à cet animal exotique.

Cet fut d'ailleurs peu après cette visite qu'il ordonna qu'on construisît à If un port bien protégé et que l'on y dressât une forteresse imprenable.

François Ier

La construction de la forteresse programmée dès 1524 fut entreprise à partir de 1528 et achevée vers 1531. Or, curieusement, cette place forte inexpugnable, - qui ne fut d'ailleurs jamais conquise -, devint une prison d'État.


Les premiers pensionnaires

Ce sont deux pêcheurs marseillais, quelque peu pirates et contrebandiers qui étrennèrent cette geôle. Les derniers seront des prisonniers de guerre civils en septembre 1914 (Alsaciens et Lorrains).

En dehors des cellules du rez-de-chaussée, dans lesquelles la promiscuité associée à une hygiène déplorable laisse aux prisonniers une espérance de vie de 9 mois, il est possible, moyennant finance, de louer une cellule au premier étage, appelée aussi "chambre passable" ou "pistole" (du nom de la monnaie servant au paiement). Plus spacieuses, ces cellules réservées aux prisonniers fortunés ont une fenêtre et possèdent une cheminée.


Alberto del Campo

L'un des tout premiers pensionnaires du cachot "des condamnés à mort" fut, dit-on, Alberto del Campo, l'un des criminels les plus diaboliques de l'histoire. Ce sorcier, avait déjà été condamné à mort par deux fois en Italie, sa patrie, où la renommée populaire lui attribuait d'extraordinaires pouvoirs occultes.

Alberto, dont le célèbre orfèvre florentin Benvenuto Cellini qui le rencontra dit qu'il fut l'un des sorciers les plus redoutables de la Renaissance, coupable de plusieurs centaines d'empoisonnements criminels.

Héritiers de grandes familles, seigneurs, prélats et rois, recoururent secrètement à ses services, et la "petite histoire" affirme que ce fut, entre autres, del Campo qui composa pour Catherine de Médicis quelques poisons dont elle usa pour se débarrasser des gêneurs.

Au château d'If, le cachot appelé "des condamnés à mort" situé à la hauteur de la troisième marche de l'escalier du donjon, reçoit aujourd'hui encore, hors saison touristique, à certaines lunaisons propices, de bien étranges personnages.


Un personnage sulfureux

Il fut notamment condamné par l'Église pour sa faculté de faire comparaître des esprits démoniaques, de provoquer des pluies de croix, de serpents ou de crapauds.

La légende veut qu'il se soit échappé par magie des prisons où il séjournait, fers aux mains et aux pieds, collier de fer autour du cou, avant de venir s'établir en Provence, à Aix. Là, il pratiqua à nouveau les spécialités qui l'avaient rendu célèbre en Italie: confection de poisons, évocation des morts et nécromancie.

Héritiers impatients

Les héritiers impatients, appartenant à de riches familles patriciennes ou marchandes, faisaient appel à lui pour savoir dans quel délai ils pouvaient espérer disposer enfin de leur héritage.

Le secret d'un poison indécelable

Selon Benvenuto Cellini, le célèbre orfèvre de la Renaissance, Albert del Campo, possédait le secret d'un poison indécelable, qu'il faisait servir par sa maîtresse à la personne dont il avait prédit aux héritiers la fin prochaine. On a prétendu que Catherine de Médicis le rencontra secrètement au cours de l'un de ses voyages dans le Midi et eut recours à ses services à différentes reprises.

Catherine de Médicis

Un envoyé secret de la Reine

Longtemps prisonnier au Château d'If, le mage y recevait de discrets visiteurs, avant d'être brûlé vif le 23 décembre 1588 à Aix, jour même de l'assassinat du duc de Guise et du cardinal de Lorraine, décès qu'il avait prédits au jour près à un envoyé secret de la Reine.

L'esprit errant d'Alberto del Campo apparaîtrait aujourd'hui encore près de son cachot du Château d'If, à ceux qui l'évoquent dans les règles de l'art, et leur transmettrait ses puissantes et maléfiques énergies.

Les pantacles, les formules et les rituels magiques dont usait ce sorcier hors du commun ont été fidèlement transmis de maître à élève durant quatre siècles et seraient, selon les initiés qui en gardent jalousement le secret, d'une efficacité redoutable.

Un parfum de Magie

Depuis quatre siècles, le château d'If, longtemps prison d'État, accueillit dans ses cellules ou ses "pistoles" des criminels de haut-vol tels les frères Martel, bandits de grand chemin qui moururent écartelés. On prétend qu'il reçut entre ses murailles des conspirateurs romantiques comme les marquis de Cinq-Mars ou de Lavalette, le Prince Casimir frère de Ladislas VII roi de Pologne.

Autres prisonniers de marque

En 1582, le capitaine Anselme d'Avignon, suspecté de trahison envers Henri III, y fut amené sous la garde du dénommé Le Picard, valet de chambre du grand-prieur. Celui-ci reçut l'ordre d'introduire un forçat turc dans son cachot, qui, sans autre forme de procès, étrangla le malheureux prisonnier. On jeta son corps par la fenêtre en publiant qu'il avait voulu s'évader et tout fut fini.

Au siècle suivant, Philippe de Lorraine (1643-1702), favori de Monsieur, frère de Louis XIV, passa lui aussi quelques mois dans cette belle forteresse, en 1670. Le Roi fit arrêter le chevalier à la requête de Madame, Henriette d'Angleterre, et le fit enfermer au château d'If où sa pédophilie ne passa pas inaperçue.

Philippe de Lorraine (1643-1702)

Rappelons que le Roi Soleil eut une autre raison de se plaindre de ce dévergondé, lorsque Philippe "initia" très jeune à son vice, Louis de Bourbon, comte de Vermandois, le fils légitimé que le monarque eut avec Mme de La Vallière.

En 1720, Jean-Baptiste Chataud, capitaine du Grand Saint-Antoine accusé d'avoir rapporté la peste d'Orient à Marseille y fut incarcéré.

Après lui, entre 1774 et 1775, ce fut au tour d'Honoré Gabriel Riquetti plus connu sous le nom de Comte de Mirabeau d'y séjourner à la demande de son père, pour le "remettre dans le droit chemin". Son séjour y fut agréable, logé dans une confortable "pistole" où il recevait à souper le commandant-major de la forteresse et séduisit la cantinière.

Honoré Gabriel Riquetti

Le général Kléber y demeura plus de dix ans sur l'ordre de Napoléon, frustré ne ne pouvoir exercer sa vengeance que sur son cadavre, rapatrié d'Égypte.

Au XIXe siècle, quelques femmes aussi, notamment Fanny Dillon, en 1815, lorsque son mari le Général Bertrand fut condamné à mort. Y résidèrent ensuite le révolutionnaire Louis Auguste Blanqui puis des communards, parmi lesquels Gaston Crémieux.

Les hôtes les plus célèbres de la forteresse, Edmond Dantès et l'Abbé Faria, les personnages d'Alexandre Dumas, dont le séjour ici fut minutieusement décrit par le romancier ne sont sans doute sortis que de sa fertile imagination. De même n'est-il pas certain que le divin marquis de Sade ou le mystérieux Masque de Fer aient jadis joui de l'air vivifiant de la forteresse.

Forteresse du Château d'IF

L'ensemble possède encore le lourd aspect d'un château féodal, de facture prébastionnée, mais il s'agit bien d'une forteresse, notamment du fait de ses tours d'angle, plus trapues que les tours médiévales. Abritant des canons dont la portée ne dépasse pas les 150 mètres, le château d'If ne remplit pas sa vocation défensive lors du siège de Marseille en 1536 par les troupes de Charles Quint. N'ayant jamais connu les combats, la forteresse est convertie en prison d'Etat à la fin du XVIIe siècle.

À partir de 1689, de nombreux protestants périssent entre les murs humides de ses terribles cachots, tandis que des conditions de détention plus favorables sont offertes aux prisonniers de marque, femmes volages ou fils de famille indisciplinés comme le jeune Mirabeau.

Insurgés de 1848, communards : le château d'If accueille des prisonniers politiques, avant de perdre sa vocation carcérale en 1890, à la date de son ouverture au public.

À l'intérieur du mur d'enceinte, des plaques commémoratives rappellent encore aujourd'hui le souvenir de milliers de protestants, et celui des internés politiques de 1848.

À l'intérieur du mur d'enceinte

Contrairement à la légende, le Masque de Fer et le marquis de Sade n'ont jamais été incarcérés dans le château d'If. Entre mythe et réalité, le château d'If évoque également au visiteur les personnages du "comte de Monte-Cristo" d'Alexandre Dumas, même si José Custodio Faria et Edmond Dantès n'y ont vraisemblablement jamais séjourné.

Pendant la première guerre mondiale, des Allemands, puis des Français qui avaient tenté d'échapper à la mobilisation, y sont détenus. Classé monument historique en 1926, le château est investi par les troupes d'occupation allemandes pendant la deuxième guerre mondiale.

Parmi les détenus des cellules du Château d'If, on compta entre 1545 et 1750, de nombreux protestants condamnés à ramer sur les galères. Après les émeutes de 1848 et le coup d'État de 1851 de nombreux insurgés y séjournèrent dans l'attente de leur embarquement pour le bagne de Maison-Carrée en Alger ou celui de Cayenne.



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