EDMOND BILLAUDOT
Tireur de cartes et voyant du XIXe siècle

Edmond Billaudot
Jules Charles Ernest Billaudot (1829-1881)
Illustre tireur de cartes et voyant du XIXe siècle, Jules Charles Ernest Billaudot est né à Poilly-sur-Serein dans l'Yonne. Il débuta sa carrière à l'âge de 18 ans au côté de Mademoiselle Lenormand.

C'est elle qui lui apprit les ficelles du métier, comment recruter des informateurs parmi les valets et les domestiques des grandes familles et l'entourage des financiers et des hommes politiques. Car, lui expliquait-elle, les femmes et les soubrettes, passionnées d'oracles viennent me consulter avant d'y envoyer leurs maris et leurs amis.

Prédictions
On dit qu'il annonça à Alexandre Dumas, dès 1847, qu'après d'immenses succès littéraires, il mourrait criblé de dettes.

Au début de l'année 1851, Billaudot aurait prédit à Victor Hugo qui le rencontrait volontiers, son prochain exil.

Vers 1865, Auguste Renoir fut amené en consultation chez le mage par Lise, un de ses modèles. A la vue des premières cartes tirées, Edmond esquissa un mouvement de surprise.

Vous êtes un artiste, lui dit-il, et, dans cent ans, chacune de vos pointes sèches vaudra le prix d'une calèche et chacun de vos tableaux un ... château !

Peu avant la guerre de 1870, Edmond Billaudot prédit à l'Impératrice la défaite de Sedan et la chute de l'empereur.

Il lisait l'avenir de ses consultants à l'aide d'un jeu de Tarot divinatoire naïvement dessiné par lui-même, sur le modèle de celui d'Antoine Court de Gébelin que popularisera plus tard Jean-Baptiste Alliette dit Etteilla (1738-1791). Le jeu de Billaudot sera imité d'abord par Wirth puis plagié au milieu du XXe siècle par Belline.

Mlle Lenormand
Mademoiselle Lenormand
Dans un manuscrit de ses notes quotidiennes datant de 1854, on retrouva dit-on, une vision de la Première Guerre Mondiale avec obus, tranchées et aéroplanes, qui n'étaient pas encore inventés à l'époque.
JOURNAL D'EDMOND ET JULES DE CONCOURT
Dans leur Journal, en date du 22 octobre de l'année 1856, Edmond et Jules de Goncourt racontent coment ils ont été amenés chez ce voyant par Marie, la gentille et gracieuse maîtresse qu'ils se partageaient en frères  !
Frères Goncourt
Edmond et Jules de Goncourt

JOURNAL 22 OCTOBRE 1856
Dans leur Journal, en date du 22 octobre de l'année 1856, Edmond et Jules de Goncourt racontent coment ils ont été amenés chez ce voyant par Marie, la gentille et gracieuse maîtresse dont ils se partageaient les faveurs en frères  !

29 octobre Marie m'emmène chez le grand sorcier des filles et de Paris, Edmond.

C'est dans la maison bâtie par Lechesne, 30, rue Fontaine-Saint-Georges, toute seizième siècle, fleurie de sculptures des pieds à la tête, avec des chouettes en pierre qui montent la garde sur les portes - maison, dit la voix publique, qu'Edmond a achetée avec l'argent de ses consultations.

Cour encombrée de produits sculpturaux en plâtre du nommé Lechesne, sur des piédestaux de bois marbré: chasse au sanglier, terre-neuve défendant un enfant nu contre un serpent. A ce propos, jamais un sculpteur de talent n'essaiera un terre-neuve, animal tout voilé et tout embarrassé dans ses poils frisés; à la sculpture, les animaux râblés et visiblement bridés et boudinés dans leur peau rase et collée sur les muscles.

tarod edmond
Tarot Billaudot
Au premier, une vieille femme à cheveux blancs, la mère Edmond, ouvre, salue et introduit dans une salle à manger toute déshonorée et bourgeoisifiée par le carton-plâtre seizième siècle. Aux murs, encadrés, les Moissonneurs de Léopold Robert, personnages lithographiés par Julien et coloriés. Au-dessous, encadrées sur fond noir, des mains de papier blanc, découpées, avec des lignes et des signes tracés à la plume: main de Robespierre, main de l'empereur, main de l'impératrice, main de Mgr Affre, «tué sur les barricades», et - ceci étant un parloir de putains qui espèrent - la main de Mme de Pompadour. A la glace, pancarte contenant tout ce qu'on peut demander : Talismans, thèmes généthliaques, horoscopes, etc.

Une porte s'ouvre et l'homme paraît, vous invitant à entrer. Un grand homme, une grosse tête carrée, de gros traits et de grosses moustaches, la figure forte des portraits de Frédéric Soulié; une robe de chambre de velours noir, de grandes manches pendantes. La chambre est noire ou à peu près; les rideaux fermés, avec du haut de la fenêtre, par les vitraux de couleurs, un jour prismatique et bigarré, tombant et dansant en descendant dans cette nuit fourmillante et pleine de choses, que l'ìil tâtonne et ne peut saisir: un hibou blanc, etc.

- On s'assied. Il s'assied. Une table vous sépare, où le jour mystérieux aboutit comme dans un tableau de Rembrandt.

« En quel mois êtes-vous né ? Quel âge avez-vous? Quelle fleur aimez-vous ? Quel animal préférez-vous? »

Puis, remuant un paquet de cartes hautes comme la main: «Prenez-en treize au hasard.» Et il les retourne. Sur chaque carte est figurée une chose, une passion, une rencontre, un tableau de la vie, par exemple une femme brune - toutes allégories ou images peinturlurées de rouge et de noir, dessinées par un homme ignare du dessin, avec une imagination bizarre et touchant au burlesque, fantastique et bourgeoise, monstrueuse comme le dessin de je ne sais quelles fatales divinités du jour le jour et de la réalité crue, croquées et virulemment sanguinées par l'enfant fou d'un bourgeois de la rue Saint-Denis. Au-dessus de chaque carte sont écrits la signification et le dire.

Alors, avec un geste impérieux et l'index de la main plongeant dans l'échelle descendante de la lumière, comme montrant et assignant l'avenir, l'homme commence et d'une voix canaille, avec des intonations du peuple, il vous récite pendant une demi-heure le roman qui vous menace.

Tarot destin
La Destinée
Cet homme est rare en un tel métier: il parle sans tarir, sans arrêt, sans repos, enflant et descendant sa voix, avec - au milieu de toutes les solennelles phrases de l'orateur du futur et de tous les grands riens de la faconde divinatrice. Des trappes s'ouvriront, des fantômes s'avanceront contre vous avec leurs griffes - avec, au milieu de cela, de ce parlage qui coule majestueusement comme l'eau - des éclats de phrases et de voix de Vautrin, des Vous aurez une femme, vous la lâcherez  ! et des sourires crapuleux et profonds sur votre individu.

Au parmi de tout ce, des bercements de la partie aventureuse de l'âme dans l'invraisemblance et le feuilleton de la vie : «Des femmes puissamment riches, étrangères et que vous connaîtrez dans une ville où il y aura des ruines», etc., etc.

- Un Vous perpétuel : «Vous, vous êtes comme ci... comme ça... Vous avez un baromètre dans le cerveau.» Et tant d'images de kaléidoscope et de lanterne magique, des jours promis et un bruit de paroles et de choses et un tel tumulte de faits prévus et prédits, que cet homme semble, avec sa voix sonore et ses yeux qui vous fixent, verser la confusion dans votre tête et l'étourdissement dans votre attention... Un habile homme, qui a l'éloquence qu'il lui faut - j'allais dire toute l'éloquence: l'art de paraître parler.

Une seule chose m'a frappé; c'est un hasard assez bizarre que cela lui soit tombé sous la langue : «Vous, vous n'avez rien à craindre d'un coup d'épée ou d'un coup de pistolet, vous avez tout à craindre d'un trait de plume !» Vraiment le hasard ne l'a pas trop mal servi, parlant à un homme de lettres déjà poursuivi et qui se sent poursuivable toute sa vie... Mais dans la bouche du devin, la phrase n'avait-elle pas un autre sens ? Voyant un jeune homme avec une femme légère du quartier, son trait de plume ne faisait-il pas allusion à la signature de billets ?

Cela m'a coûté quarante sous; mais j'ai connu le confesseur qui vend l'Espoir à Paris. Quelque chose à faire sur le tireur de cartes... Et je suis sorti convaincu que la sorcellerie mourrait le même jour que la religion: deux fois immortelles comme l'Espérance humaine. Les sorciers dans un pays sont en proportion de la religion.

Seance de voyance
Tireuse de cartes


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