Histoire du Reiki et de son fondateur
 

 
Mikao Usui
(1865-1926)
 

Une légende vivante

Gyoho Mikao Usui naît à Taniai-mura (actuellement Miyama-cho), province de Yamagata, le 15 août 1865. Son père, militaire de carrière, se nomme Uzaemon Tsunetane Usui, sa mère est issue de la famille aisée des Kawai. Le nom ancestral des Usui est Chiba, en référence à Tsunetane Chiba (un samouraï du 8e siècle qui s'illustra au cours d'une bataille opposant le shogun aux habitants félons de la ville d'Usui).

 
Les adeptes de Mikao Usui ont tissé autour de leur Maître un tissu de légendes tel que le sage lui-même fut obligé de son vivant, à plusieurs reprises de rétablir la vérité sur ses origines somme toutes modestes, sa jeunesse laborieuse et sans grand panache.

En fait, Mikao Usui, n'a jamais été un moine chrétien, ni professeur d'université, ni docteur en médecine ou en quelque autre science que ce soit. Mais il s'est instruit durant toute sa vie, en quête d'une spiritualité véritable et sincère, de connaissances exactes et précises, de sensations authentiques.

Cela dit, il fut toujours un élève attentif et doué, un autodidacte à l'intelligence vive et un travailleur acharné.

Jeune homme, il voyagea à travers plusieurs pays notamment en Chine de l'Ouest, et au Tibet, tant dans le but de s'instruire que pour y travailler.

 
Ère Meiji

Trois ans après sa naissance, en 1868, l'Empereur Meiji dont le règne s'étend de 1868 à 1912, inaugure une nouvelle ère pour sa patrie, restaure et modernise le Japon, ouvrant le pays aux étrangers (Gaïjins).

Parallèlement aux innombrables réformes permettant l'accès du pays aux sciences et aux techniques occidentales, l'empereur, dans sa sagesse, prône également un retour aux traditions nationales du Confucianisme et du Shintoïsme sans répudier le Bouddhisme ou interdire les religions étrangères.

Le père de Mikao Usui se rallie au nouveau régime et souhaite orienter l'éducation de ses enfants selon les voeux de l'Empereur.

En 1869, à l'âge de quatre ans, Mikao Usui est admis comme élève dans un monastère de Tendaï où l'enfant apprend non seulement la lecture et la calligraphie, mais s'initie également au Ki-Ko, version japonaise du Qi-Gong traditionnel chinois.

On retrouvera plus tard dans le reiki certaines techniques de cette discipline, telles que "la Paume d'énergie", "la Main de protection", etc.).

Parfois, en guise de récompense pour son assiduité, Mikao accompagnera les moines de son institution, sur le mont Kurama, un des hauts lieux du bouddhisme, propice à la méditation.

L'ouverture des ports japonais aux industriels et négociants étrangers provoqua un afflux de "barbares" venus de l'ouest et la propagation de leur culture.

Lorsque, en 1873, l'empereur lève l'interdiction de l'exercice de la religion chrétienne, de son prosélytisme, Mikao dont l'intelligence est vive et l'esprit ouvert à toute connaissance nouvelle, est frappé par ce que l'on raconte autour de lui de cette religion des "gaïdjin". Malgré les horreurs qu'il entend à son propos, il s'y intéresse et s'informe à son sujet. On dit même qu'il fut séduit par l'enseignement du Christ.

 
Le premier moteur

Ce fut en 1881, en pleine adolescence raconte Mikao, «que j'aperçus pour la première fois un moteur. Je fus ému jusqu'aux larmes par la symétrie, l'harmonie, la perfection, l'élégance, la beauté et le fonctionnement de cet objet.»

Désormais, passionné par la science autant que par les arts martiaux et la religion, Usui, touche à tout, étudie et apprend beaucoup, s'intéresse à tous les domaines de la connaissance.

Éternel chercheur, étudiant sans spécialité, il est en quête perpétuelle de sagesse et mettra beaucoup de temps avant de découvrir sa véritable voie.

1892 - A l'âge de 27 ans, Mikao Usui se convertit au bouddhisme shingon, ce qui entraîne des remous dans sa famille restée traditionnaliste. Usui étudie tout ce qui lui tombe sous la main, sans jamais s'attarder.

Mais, si cette recherche nourrit son esprit et fortifie son intelligence, cette quête perpétuelle ne lui permet pas de se faire une place au soleil.

Durant des années il exercera pour survivre de nombreuses activités et vagabondera à travers le monde, faisant face à l'adversité avec courage. Il connaîtra la pauvreté, des échecs répétés dans ses entreprises et dans sa vie sentimentale, une impossibilité de se fixer dans une activité suivie.

Il reviendra toutefois toujours à ses deux principaux pôles d'intérêt : la spiritualité et les médecines traditionnelles.

Où qu'il se rende, à Tokyo, en Chine, aux USA ou en Europe, il continue à se former, à s'informer, à apprendre.

 
Médecines occidentales

De 1898 à 1906, il exerce plusieurs professions, généralement sans aucun succès: missionnaire bouddhiste en Occident (congrès de Chicago), fonctionnaire, homme d'affaires (mais il fait faillite), journaliste il végète dans de petits organes de presse, fonctionnaire, il sera le secrétaire éphémère du bourgmestre de Tokyo, puis deviendra pour quelques mois conseiller du gouverneur de Taïwan. Mais il ne se sent aucune vocation pour la fonction publique.

Il vit comme l'oiseau sur la branche, avec pour seules richesses une vive intelligence et un esprit libre. Pour survivre, il sera tour à tour moine ambulant - mais pas reclus - médecin aux pieds nus, visiteur de prison.

Un jour, au contact de médecins hollandais, puis d'autres, plus tard, américains, il découvre la médecine occidentale et l'étudie quelque temps en auditeur libre.

En 1905, la victoire de Port-Arthur sur l'Empire russe propulse le Japon sur le devant de la scène mondiale. Le pays s'enrichit, devient à la mode, s'ouvre à l'Occident.

Toujours pour survivre, Mikao Usui exerce autour de lui les diverses techniques thérapeutiques apprises au cours de sa vie aventureuse, mêlant l'empirisme oriental, les pratiques traditionnelles locales et ce qu'il a assimilé de la médecine savante occidentale.

Vers 1906, âgé de 40 ans, financièrement à flots, il se marie avec Sadako Susuki dont il aura deux enfants: un fils prénommé Fuji (1908-1946) et une fille, Michiko (1913-1935).

 
Initiation

Les querelles avec sa famille, restée profondément traditionnaliste, s'intensifient. Ses parents réprouvent ses recherches spirituelles hors des sentiers battus, son approche ésotérique (Mikkyo) du bouddhisme et son apprentissage de l'Hatsurei-hô, technique de purification de l'énergie, de la parole et du souffle basée sur les notions de corps, d'âme et d'esprit chères au christianisme.

Durant son initiation au Shintô, il reçoit le «Reiju» c'est-à-dire le pouvoir de transmettre une initiation spirituelle traditionnelle.

Usui s'investit alors, durablement semble-t-il, dans l'«Anshin ritsumei», abandonnant la croyance dogmatique privilégiant le karma au profit de l'état de «Dzogchen» du bouddhisme tibétain, intuition transcendantale inspirant tout acte humain.

Éternel chercheur, assoiffé d'absolu, il poursuit inlassablement sa quête désespérée d'une force universelle toute puissante dont il devine l'existence.

En 1910, le charisme et les premiers succès thérapeutiques de Mikao Usui commencent à le faire connaître comme guérisseur. Des personnalités en vue l'appellent à leur chevet et il parvient souvent à les soulager durablement de leurs maux. Une légende répandue par ses thuriféraires voudrait que l'Empereur Meiji mourût en 1912 dans les bras de Mikao appelé à son chevet!

1912 : C'est le début de la période Taisho, du nom du nouvel Empereur, fils de Meiji.

1918-1921 : toujours en quête d'une spiritualité qui comble pleinement ses aspirations, Mikao Usui s'initie durant trois années au bouddhisme Zen.

 
L'Illumination

1922 - Inquiet de ne pas atteindre l'immédiat Satori promis par les adeptes Zen malgré ses efforts et sa bonne volonté, il demande à son Maître ce qu'il doit faire.

Il obtient une réponse à la fois abrupte et précise: «Éveille-toi ou meurs!».

En mars 1922*, il se rend sur le mont Kuri Yama près de Kyoto, pour atteindre l'Éveil ou se faire hara-kiri. Pour cela, il pratique le «Shyu-gyo», une discipline de jeûne absolu et de méditation profonde semblable au «:Nyung-Naï» tibétain.

Cette ascèse totale dure 21 jours. Au dernier jour, à bout de forces, Mikao sent qu'il va mourir. Lorsque soudain, dans son demi coma, il voit apparaître quelque chose d'éblouissant qui se met à tourner au-dessus de sa tête, de plus en plus vite. Une lumière intense l'entoure de toutes parts.

C'est la révélation tant attendue, l'illumination, la découverte de la "force vitale universelle" cette grande lumière blanche dans laquelle se manifeste la présence divine.

Usui comprend immédiatement qu'il vient de trouver ce qu'il cherchait depuis son enfance. Cette force divine essentielle, universelle, capable à elle seule de transfigurer, de soulager, d'enrichir spirituellement, de nourrir et de guérir le corps et l'esprit. Il essaye aussitôt le pouvoir de cette force sur sa famille et sur ses proches et met au point le manuel de soins qui deviendra le Usui Reiki Hikkei.

Pour Mikao c'est l'euphorie, la sérénité, la certitude d'avoir découvert le sens même de la vie.

 
Le Reiki

En fait, la thérapie mise au point par son fondateur, représente une modernisation et une simplification des gestes et des rites de la médecine traditionnelle chinoise pratiquée depuis des millénaires par les guérisseurs ambulants.

De même que l'acupuncture en médecine traditionnelle chinoise, la digipuncture ou toucher thérapeutique des guérisseurs occidentaux, le reiki considère la maladie comme une perturbation de la force vitale. Dans l'esprit d'Usui, il s'apparente à l'imposition des mains de la tradition chrétienne

Dans les trois cas, la théorie voudrait qu'une énergie particulière circule à travers tout l'univers, sous une forme qui ne peut être mesurée, mais que certains initiés peuvent percevoir et utiliser pour guérir leur prochain.

Le praticien du reiki diffère de l'acupuncteur en ce qu'il ne tente pas de débloquer le ki de son patient, mais cherche plutôt à canaliser vers lui, à travers lui-même, cette énergie universelle dans le but de rétablir l'équilibre et l'harmonie du malade.

L'opération se fait par imposition des mains, sans qu'un contact ne soit nécessaire, comme pour le toucher thérapeutique occidental, puisque le ki passe de l'éther à celui du patient par l'intermédiaire du guérisseur qui n'est qu'un canal.

Les praticiens reiki précisent dans leur langage qu'ils insufflent le ki à leurs malades pour leur apporter un «rééquilibrage énergétique».

Ils prétendent, en outre, accroître leur propre énergie chaque fois qu'ils opèrent une guérison, en emmagasinant dans leur corps le surplus de l'énergie universelle transitant à travers eux.

Comme les adeptes des autres disciplines spirituelles à vocation thérapeutique, ils affirment, que leur art intensifie le processus naturel de guérison, provoque l'élimination des toxines, rééquilibre le système énergétique, active le système immunitaire, dissout les blocages.

Selon l'excellente praticienne Monika Stämpfli-Müller, le reiki accompagne et renforce chez le malade le traitement médical en cours, mais ne doit jamais l'interrompre sans l'avis du médecin qui l'a prescrit.

 
Une clinique de soins

En avril 1922, Usui fonde la Usui Reiki Ryoho Gakkaï et ouvre une clinique de soins à Tokyo, établissement qui connut immédiatement un très vif succès.

Il poursuit ses activités en enseignant sa pratique thérapeutique, partageant ses connaissances avec des élèves à Harajuku, à travers le Reiju, codifiant le Sho-den, 1er degré de l'initiation, accessible à tous, puis le Reihô perfectionnement de sa méthode.

Au cours de la même année, un terrible tremblement de terre blesse des milliers d'habitants qu'Usui soigne avec dévouement et compassion, venant généreusement en aide aux centaines de mendiants jetés sans ressources dans les rues détruites. Il en profite pour les morigéner et les tancer pour leur ingratitude et leur manque de volonté pour s'en sortir.

Il s'était aperçu que la plupart d'entre eux échouaient à reprendre pied, à se remettre en selle, refusant par paresse d'assumer les responsabilités quotidiennes de la vie. D'où un certain nombre de déductions s'imposèrent à lui.

D'une part, il fut convaincu que la participation de l'individu dans le processus de sa propre guérison était essentielle. D'autre part, qu'aucun changement durable n'est acquis dans la vie si l'individu n'en éprouve pas lui-même le désir intime ou si sa volonté de guérir ne l'incite pas à en faire la démarche. Enfin, toute tentative d'aide à autrui doit s'accompagner d'un échange d'énergie.

1925 - La clinique dans Harajuku devient trop étroite pour les centaines de patients qui affluent de partout et Usui s'installe dès février à Nakano, un nouveau quartier de Tokyo. Malgré une santé déficiente - il a subi plusieurs crises cardiaques - Usui voyage à travers tout le Japon pour enseigner et soigner.

Au cours d'un séminaire, Usui fait la connaissance de deux auditeurs venus suivre son enseignement : Georges Ohsawa (1883-1966), le créateur de la célèbre méthode diététique connue sous le nom de macrobiotique et le charismatique Ueshiba Morihei (1883-1969) qui venait l'année précédente de fonder une école d'arts martiaux d'un genre tout nouveau, l'aïkido.

1926 - Le 9 mars, Usui succombe à la dernière de ses attaques cardiaques, celle-ci touchant le cerveau. Il meurt à Fukuyama dans le district d'Hiroshima, lors d'une tournée d'enseignement et de soins aux malades. Il avait 62 ans.

 
Voix discordantes

De nouvelles informations sur le Reiki et son histoire, un peu plus crédibles que les contes divulgués par ses adeptes, commencent à filtrer depuis quelques années, affadissant quelque peu une légende sulpicienne.

Selon Mitsuko Kagamushi, des lignées japonaises d'élèves et de disciples de la première heure restés fidèles à l'enseignement authentique d'Usui, contredisent souvent l'histoire du reiki telle que nous l'ont contée ses sectateurs. Mitsuko Kagamushi affirme que les faits merveilleux rapportés dans la majorité des ouvrages publiés sur le sujet sont pure affabulation.

Contrairement à ce que prétendent ses thuriféraires, Mikao Usui n'était ni docteur en médecine ni prêtre chrétien. Usui, ayant été initié à différentes obédiences bouddhiques, enseignait une méthode thérapeutique initiatique adaptée de pratiques populaires ancestrales millénaires.

Ses adeptes appelaient cette méthode Usui Do (la voie d'Usui) ou Usui Treate (imposition de mains d'Usui). Ce n'est qu'après sa mort que ses techniques prirent, dans certaines lignées, le nom de "Reiki".

Mitsuko Kagamushi affirme qu'à la disparition d'Usui, un clan usurpa son enseignement et travestit sa méthode de soin, ouvrant la voie aux dérives sectaires et marchandes que nous connaissons en Occident.

La fraude alla jusqu'à falsifier gravement son enseignement en publiant de faux ouvrages dont une fausse autobiographie attribués à cet être de lumière, en quête d'absolu, en constante recherche sur le chemin de la vérité et de la connaissance.

 
* La stèle funéraire de Mikao Usui qui indique la date de 1914 pour son Illumination, comporte donc une erreur, puisqu'une note manuscrite de la main même d'Usui parle de 1922.
© Pierre Genève 1992

 
SOURCES:
  Stephen Bryan
Lama Detchen Kunzang Trinley
Mitsuko Kagamushi
Hiro Kawasaki
Roland Massot
Monika Stämpfli-Müller
Jörg Tannenberg
Encyclopedia Japonica

Dernière mise à jour: mars 2005


 

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