Histoire des sciences divinatoires
 

 

VOYANTS, ASTROLOGUES
PROPHÈTES ET DEVINS


 

Rome antique et Empire romain

 
Vertène, Mystratès, Petosiris, Nechao ou Nechepso
Harkhebis, Chaeremon, Bérose, Aratus ou Aratos
Hipparque de Nicée, Thrasylle, Pammène

 
Dans la haute antiquité, tant dans l'ancienne Perse qu'à Babylone ou dans l'Égypte des Pharaons, les sciences divinatoires étaient un domaine réservé aux prêtres. La "haulte science" demeurait secrète et anonyme. Le nom des grands initiés n'était pas connu du public.
A Rome, ce ne fut que vers la fin du règne de Tarquin le Superbe (vers 500 av. J.-C.) que des noms de devins initiés dans la magie, l'astrologie ou la nécromancie, commencent à circuler. Les voyants de la Rome antique sont généralement d'origine étrusque (Haruspices) ou chaldéenne (Astrologues), puis, avec l'avènement de l'empire, l'influence égyptienne prévaudra.
Les supports de la voyance prédictive furent l'examen des entrailles des animaux, le vol des oiseaux, les signes fastes ou néfastes, l'interpr&aecute;tation des songes, l'interrogation des oracles.

 
Vertène

Verronius (ou Vertenius, ou Vertène). D'origine étrusque, fut l'un des premiers devins romains à laisser un nom dans l'histoire. Mage attitré de Tarquin, il examinait les entrailles des animaux, étudiait les astres, leur progression dans le ciel, interprétait les phénomènes célestes comme l'apparition d'une comète ou météorologiques commes les pluies rouges ou les tornades et en retirait un enseignement prédictionnel. Tarquin adopta les pratiques divinatoires étrusques de Verronius et les imposa à Rome.
Le nom de quelques autres devins savants sont venus jusqu'à nous, notamment :

 
Mystratès (vers 450-380 av. J.-C.).

Grand voyageur, il se mit au service d'Alcibiade, puis, après sa disgrâce, à celui de Denys de Syracuse. Mystratès prédit à Camille (Marcus Furius Camillus) que Rome alors petite ville du Latium, deviendrait la cité la plus puissante de l'univers et la maîtresse du monde.

 
L'astrologie en Égypte
Petosiris (IVe siècle av. J.-C.)

En fait, l'astrologie en tant que science divinatoire, semble étrangère aux Anciens Égyptiens. S'il est avéré que des astrologues officièrent à la cour des Ptolémées, leur "art" était considéré comme un art importé. Ce n'est qu'à partir de cette dynastie et de l'immense succès du livre de Néchepso-Pétosiris que la plupart des auteurs antiques considérèrent l'Astrologie comme une science égyptienne.
Grand prêtre du dieu Thot à Hermopolis, Petosiris laissa une empreinte durable dans la petite histoire grâce à la mystérieuse consultation privée donné:e à Alexandre le Grand qui venait de chasser les Perses d'Égypte. Le monarque remercia le prêtre en faisant réparer les destructions opérées par l'envahisseur à son temple. Les fameuses tables astrologiques dont on lui attribue la paternité furent publiées en se réclamant de l'autorité du roi.
En fait, selon certains auteurs, ces tables attribuées à Petosiris se trouvaient déjà dans un ouvrage plus ancien dont il reste peu d'extraits : le Salmeschoiniaka.
Ces tables astrologiques furent consultées durant plusieurs siècles par les nobles dames de l'antiquité. Juvénal dans ses "Satires" se moquera de ces riches romaines qui ne prennent pas un rendez-vous sans consulter leur "Petosiris" ! Vers 1920, on retrouva sa tombe intacte, couverte d'inscriptions, recueillies sous le nom de "Enseignement de Pétosiris".

 
Néchepso (ou Nechao ou Nékao II)
(609-594 de la 26e dynastie)

Deuxième roi de la XXVIe dynastie, Nechao succède à Psamménique.
Dès son plus jeune âge, il eut des visions prémonitoires qui troublèrent son entourage.
Une de ses premières prémonitions fut que sous son règne un canal maritime serait creusé entre la mer Méditerrannée et la Mer rouge et qu'une flotte égyptienne ferait le tour complet de l'Afrique en partant de la Mer rouge pour revenir par les "Colonnes d'Hercule" (détroit de Gibraltar). Réalisations effectivement accomplies sous son règne.
Après la mort de Psamménique, il vit apparaître son père en songe qui lui enjoignait d'attaquer Josias, roi de Juda, et de reconquérir la Syrie et la Palestine.
Par piété filiale, Nechao rétablit l'autorité de Pharaon dans cette contrée, mais il savait que sa victoire serait de courte durée car une autre vision le prévint qu'il serait battu par Nabuchodonosor à Karkemish, ce qui se produisit.

 
Harkhébis
(IIe siècle avant Jésus-Christ)

Prêtre, inventeur et savant, Harkhébis se spécialisa dans l'étude du Ciel et du Temps. Il améliora la fameuse clepsydre d'Amenemhat, observa avec précision la planète Vénus et ses révolutions. Dressant des horoscopes pour les grands de la cour, les déductions qu'il tira de ses calculs astronomiques et qu'il utilisa dans l'exercice de l'art divinatoire pour prédire à ses consultants les mariages à venir, les séparations, les drames amoureux ou conjugaux, lui valurent une grande renommée.
Ce savant personnage était à la fois astrologue et éleveur de serpents ce qui lui valut le surnom de "psylle-astrologue". Les Grecs lui attribuèrent le don de prévoir les tremblements de terre grâce à l'observation des reptiles. Faisant autorité dans le domaine fort utile de la connaissance des poisons, on dit que la famille royale eut souvent recours à ses services. On a retrouvé dans le Delta du Nil une statue où sont gravées ses observations astronomiques.

 
Chaerémon

On connaît peu de choses de la vie de ce Scribe (hiérogrammate) alexandrin né au Ier siècle av. J.-C.
Selon Merkelbach, Chaerémon ne faisait qu'un avec le prêtre égyptien et philosophe stoïcien du même nom, dont la petite histoire affirme qu'il fut appelé à Rome comme précepteur de Néron.
On lui doit de curieux écrits fort énigmatiques et des prédictions souvent mystérieuses, mais très prisées à son époque. Son Zodiaque rompant avec l'influence et la tradition babylonienne, offrait pour la première fois semble-t-il une formulation originale et une gamme de signes purement égyptiens.

ASTROLOGUES GRECS


Bérose

Bérose, prêtre du dieu Mardouk, astronome, inventeur et historien chaldéen, né vers 330 avant J.-C. à Babylone, est mort à Cos vers 260 av. J.-C.
Il fut le contemporain de Cassandre (354-297), roi de Macédoine qui accéda au trône vers 305, lors du partage de l'Empire d'Alexandre. Consulté par le monarque, Bérose lui annonça qu'il conquerrait Athènes, ferait mettre à mort Olympias la mère d'Alexandre, puis sa veuve Roxane et son fils Aigos. Cassandre promit à son astrologue une mort ignominieuse si ses prédictions ne se réalisaient pas. Mais le destin confirma les prédictions du devin.
Libre, Bérose se retira dans l'île de Cos où il ouvrit une école d'astrologie, inventa un cadran solaire et écrivit une histoire de Babylone. Sa renommée s'étendit jusqu'à Rome et à Alexandrie.
Consulté par Démétrios Poliorcète, il lui annonça qu'il se rendrait maître du trône de Macédoine à la mort de Cassandre, reconquerrait Athènes mais qu'il serait battu par Pyrrhus.

 
Aratus (ou Aratos)
(vers 315-240 av. J.-C.)

Poète grec ami de Théocrite, Aratus de Soloi vécut à la cour macédonienne d'Antigonos Gonatas et fut ensuite le protégé du roi Antiochus Soter. Il est l'auteur d'un long poème didactique : Les Phénomènes, où il mêle prédictions astrologiques et météorologiques.
Lisant le temps qu'il ferait dans le ciel, il étudiait les nuages, le vol des oiseaux, la limpidité plus ou moins parfaite de la lumiè.re. Cet ouvrage demeura la référence de la conception occidentale du monde jusqu'à l'époque de Charlemagne où l'astrologie arabe vint la supplanter.
On affirmait qu'Aratus avait le pouvoir de chasser les nuages, d'arrêter l'ouragan mais aussi de faire tomber la pluie ou la foudre où il voulait !

 
Hipparque de Nicée
(IIe siècle av. J.-C - entre -190 et -126)

Il fut l'un des plus célèbres astronomes et mathématiciens de l'antiquité. Il vécut à Rhodes. On lui doit la théorie de "la précession des équinoxes", une table géométrique des "cordes", la division du cercle en 360 degrés, la description et la carte de plus de 850 étoiles qui servira aux astronomes jusqu'à Copernic, la construction de l'Astrolabe.
Il s'intéressa à l'astrologie, établissant par jeu le thème de ses amis et de quelques célébrités de son époque. Vers la fin de sa vie, il reconnut sincèrement l'inanité de ses recherches et de ses prédictions astrologiques, se révélant ainsi le premier scientifique de l'histoire à séparer l'astrologie de l'astronomie. Hipparque est considéré comme le fondateur de la trigonométrie, 1500 ans avant Regiomontanus.
Pline l'ancien qui l'admirait beaucoup a écrit : «Il a prédit pour six cents ans le cours des deux astres (Soleil et Lune). Il a marqué les mois, les jours, les heures et la position des lieux d'où l'on pouvait observer les phénomènes (éclipses). Il a pris les siècles à témoin. Il a parlé en confident et en interprète de la nature.»
Toujours selon Pline Hipparque aurait assisté à la naissance d'une étoile ! Malheureusement pour nous la plupart des ouvrages qu'il a écrits ont disparu.

 
Après Hipparque

Après Hipparque, l'astrologie tomba généralement de la main des savants dans celles des marchands d'illusion.
Néroman, dans sa «Grande encyclopédie illustrée des Sciences occultes», constate qu'à partir de cette époque, "Les grands secrets devenaient la proie des gens sans culture, car Rome régnait sur le monde." et plus loin  : "Dès que des exploiteurs incultes eurent pris possession de l'instrument astrologique, le souci d'en tirer profit étouffa celui de comprendre et de conserver les lois inaltérées."

 
Parmi ces astrologues mondains, signalons :
Nechepso (Ier siècle av. J.-C.)

Astrologue et écrivain égyptien, il légua à la postérité un ouvrage curieux "La clepsydre", dans lequel il établit le thème fantaisiste de toutes les célébrités de son époque.
Souvent imitée ou copiée cette oeuvre lui valut autant de louanges que d'ennuis de la part des puissants dont il parlait, selon que son horoscope leur fût favorable ou défavorable.
On lui doit aussi cette surprenante prédiction de la fin de l'Empire romain, environ 1200 ans après sa création et «500 ans après la naissance d'un "fils de Dieu" qui mourrait sur la croix».

 
LES CHALDÉENS
Astrologues et Voyants de la Rome impériale

Thrasylle
Astrologue de l'empereur Tibère
(Rhodes v. 50 av.J.-C. - Capri 36 ap. J.-C).

Astrologue, ami et confident de Tibère, Thrasylle l'ancien fut l'un des devins les plus célèbres de l'antiquité. La petite histoire prétend que Tibère fit sa connaissance à Rhodes où le mage pratiquait les sciences divinatoires apprises auprès des Chaldéens.
Tibère (Tiberius Julius Caesar) né à Rome vers 42 av. J.-C. mort à Misène 37 ap. J.-C., est le fils de T. Claudius Nero et de Livie.
Après que, en 38 av. J.-C., sa mère se fut remariée avec Octave (le futur empereur Auguste), Tibère peut espérer entrer dans la famille de son beau-père par adoption.

 
Conseiller d'Auguste qui l'initiera aux arcanes du pouvoir, le jeune Tibère se voit confier des missions de confiance tant aux armées que dans la haute administration. En vue de son adoption qui lui permettra d'en faire son héritier et successeur, Auguste obligera Tibère à répudier sa femme Vipsania Agrippina qu'il chérissait, pour épouser sa fille Julie (11 av. J.-C.).

Mais Julie n'était pas une femme de tout repos. Menant une vie de débauche, se prostituant sans vergogne à des affranchis voire même à des gladiateurs, elle ridiculisait constamment son époux. Tibère haïssait Julie et rongeait son frein.

 
En 6 av. J.-C., Tibère jaloux de Caïus et de Lucius Caesar, petits-fils et héritiers présumés de l'empereur au même titre que lui, quitta sa femme et son palais pour se retirer à Rhodes où il demeurera en exil jusqu'en 2 apr. J.-C.

Ce fut dans cette île que Tibère fut initié aux sciences divinatoires, notamment à l'astrologie, par des Chaldéens et fera la connaissance de Thrasylle qui deviendra son maître en astrologie et en magie opératoire, son conseiller et son plus fidèle ami.

 
Durant toute sa vie, Tibère manifestera de surprenants dons de voyance qui étonneront ses contemporains. Dans les "Annales", Tacite raconte comment, à Capri, lors d'un entretien avec Galba alors proconsul, Tibère l'ayant sondé sur différents sujets, finit par lui dire en grec : «Toi aussi, Galba, tu goûteras durant quelques jours à l'empire», lui prédisant ce pouvoir que le proconsul obtiendra si tard et pour très peu de temps.

 
En 2 apr. J.-C., les deux princes concurrents de Tibère à l'Empire, disparaissent opportunément.

 
Auguste autorise alors son gendre à revenir à Rome

Tibère ramène Thrasylle de Rhodes dans ses bagages. Dans sa villa de Capri, l''empereur consultait volontiers les devins et les astrologues qu'il recevait dans une partie élevée de sa maison dont la terrasse dominait une falaise rocheuse à pic sur la mer.

 
Une légende prétend qu'un esclave vigoureux mais sourd et muet, seul dans la confidence, lui amenait par des escaliers secrets l'homme dont Tibère se proposait d'éprouver la science et le pouvoir occulte. Et, au retour, son homme de confiance le précipitait dans la mer, afin d'ensevelir avec lui les secrets de son maître.

 
Tacite relate comment Thrasylle fut amené par le même chemin. Le devin consulta les étoiles, étudia le ciel de Tibère, lui révéla quelques faits précis de son passé.

Il lui promit l'Empire, lui dévoila très habilement l'avenir. Ses réponses ayant frappé le prince, il lui demanda si lui-même avait fait son horoscope et ce qu'il pensait de l'année, du jour où il était.

Thrasylle observe de nouveau la position des astres, hésite, pâlit; et ses observations ne faisant qu'augmenter sa surprise et sa frayeur, il s'écrie : « pour moi le moment est critique, je touche presque à ma dernière heure».

Tibère l'embrasse, le rassure sur le péril qu'il avait deviné, et dès lors regardant ses prédicitions comme un oracle, il l'admit dans sa plus intime confiance.

 
Un autre auteur, Publius Manlius Cunctor, raconte que Thrasylle prédit ce jour-là à Tibère son adoption par Auguste et qu'il hériterait bientôt de l'Empire mais que, sitôt intronisé, il ferait tuer Julie et se débarrasserait de son fils adoptif et de son demi-frère.

 
Or, ces prédictions se réalisèrent à la lettre. Car, si Auguste adopta Tibère en vue de lui léguer l'empire, il adopta également Agrippa Postumus afin de garder deux fers au chaud. Et pour mieux assurer l'avenir de l'Empire, Auguste obligea même son fils adoptif et gendre à adopter son neveu, Germanicus, bien que Tibère eut déjà un fils légitime, Drusus le jeune.

 
Comme Thrasylle l'avait prévu, en l'an 14, à la mort d'Auguste, Tibère succède sans difficultés à l'empereur et peut enfin donner libre cours à sa vengeance. Dans un premier temps, il fait tuer Julie son épouse tant haïe mais également Agrippa Postumus son rival potentiel au trône. Quelques années plus tard il fera empoisonner Germanicus dont la popularité lui faisait trop d'ombre et afin de préserver les chances de son fils Drusus d'accéder à l'Empire.

 
Lecture des livres sibyllins

A part ces quelques faits, nous connaissons peu de choses de la vie de Thrasylle. On dit qu'il conseilla utilement Tibère dans ses décisions politiques, lors de ses interventions en Germanie ou en Arménie, et que Tibère lui confia l'administration épineuse de l'interprétation annuelle des Livres sibyllins. Ces recueils antiques, attribués à la Sibylle de Cumes et précieusement conservés au Capitole, représentaient en fait les seuls livres sacrés de la Rome païenne.

 
Reconstitués après l'incendie du Capitole par un collège de pontifes, - il était en effet, de l'intérêt du pouvoir impérial de garder la haute main sur leur interprétation, et d'éviter une dérive des prêtres qui en avaient la gestion et la garde. La lecture de la page de l'oracle correspondant à l'année en cours par le grand pontife au cours d'une cérémonie solennelle durant laquelle il interprétait aussi les prodiges survenus, avait une énorme influence sur le peuple.

 
Une prophétie suprenante

L'histoire romaine retient également une prophétie de Thrasylle prononcée lors de la reconquête de l'Arménie par les Romains dans leur guerre contre les Parthes. Bravant le danger de mort qui attendait les astrologues dont les prédictions ne se réalisaient pas, Thrasylle affirma que Paetus serait battu par les Barbares.

 
Négligeant l'oracle, le consul décida de gagner l'Arménie malgré les auspices les plus sinistres. Comme il passait l'Euphrate sur un pont, le cheval qui portait les ornements consulaires, saisi d'effroi sans cause apparente, revint sur ses pas; une victime qu'on tenait attachée auprès de quelques fortifications commencées, franchit les ouvrages à demi construits, et s'enfuit hors des retranchements. Le feu prit à des javelots de légionnaires : prodige qui frappa d'autant plus que les Parthes ne combattaient qu'avec des armes de trait. Les Parthes mirent les légions romaines en déroute et firent de nombreux prisonniers.

 
Thrasylle-le-Jeune

Le fils de Thrasylle, Thrasylle-le-Jeune, initié aux sciences divinatoires par son père, devint à son tour un astrologue réputé. On lui doit de nombreuses prédictions d'une précision extraordinaire touchant à la famille impériale et à son entourage.

 
Mais Tacite affirme que Thrasylle-le-Jeune profitait du très efficace système d'informateurs mis en place par son père avec la complicité de Tibère pour se tenir au courant de tous les secrets, complots et rumeurs de Rome et de son empire.

 
Pammène
(37-68)

Voici le récit de Tacite : «Le consulat de Caïus Suétonius et de Lucius Télésinus amena de nouvelles calamités. J'ai parlé d'un Antistius Sosianus, exilé pour des vers contre Néron.

Cet homme ayant appris toutes les récompenses qu'on prodiguait aux délateurs, et toute l'ardeur du prince à verser le sang, il n'en fallut pas davantage pour réveiller son caractère inquiet, prompt à saisir les occasions.

 
En exil dans le même lieu se trouvait Pammène, un fameux astrologue, que son art avait mêlé à beaucoup d'intrigues. La conformité de leur sort les eut bientôt liés. Persuadé que ce n'était pas sans objet qu'il venait sans cesse des courriers à Pammène pour le consulter sur son art, Antistius découvre que Publius Antéius lui fournissait de l'argent tous les ans, et il n'ignorait pas que l'amitié d'Antéius pour Agrippine l'avait rendu odieux à Néron, que ses richesses étaient bien propres à exciter la cupidité, que cela seul en avait perdu un grand nombre.

Antistius intercepte les lettres d'Antéius à Pammène; il dérobe encore des papiers que Pammène tenait soigneusement cachés au fond de son cabinet, lesquels contenaient l'horoscope d'Antéius et celui d'Ostorius.

Muni de ces papiers, Antistius Sosianus écrit au prince que si l'on voulait suspendre un moment son exil, il irait révéler des secrets importants, qui intéressaient la sûreté de l'empereur; qu'Antéius et Ostorius n'attendaient que l'occasion; qu'ils cherchaient à pénétrer leurs destins et ceux de César.

 
Sur le champ on expédie des galères, et on ramène en diligence Sosianus. Dès qu'on eut connaisance de la délation, on jugea Ostorius et Antéius condamnés d'avance, et personne n'eût osé signer sur le testament d'Antéius, si l'on n'eût été autorisé par Tigellinus même.

 
Il avait prévenu Antéius de ne point différer ses dernières dispositions. Celui-ci, après avoir pris du poison, dont la lenteur lui parut insupportable, s'ouvrit les veines pour précipiter sa fin.» Ainsi débute dans le livre XVI des Annales de Tacite, le passage où il fait allusion au célèbre voyant Pammène.

 
Prédictions de Pammène :

Agrippine, mère de Néron, consulta secrètement Pammène sur le destin de son fils. Il lui répondit "qu'il régnerait pour tuer sa mère !" "Soit, dit-elle, pourvu qu'il règne !" (Tacite, Annales).

 
Sous le consulat de Memmius Régulus et de Verginius Rufus, Pammène prédit à Poppée qu'elle donnerait un enfant à Néron, une fille, mais qu'elle ne vivrait pas. Poppée envoya un messager à Pammène pour lui dire qu'elle exigeait de lui qu'il lui fît naître un fils car si la prédicition première du mage venait à se réaliser, elle le ferait tuer. Poppée donna naissance à une fille, Augusta, qui ne vécut que quatre mois.

 
Pour échapper à la vindicte de Poppée, Pammène réussit à se rendre invisible, aussi, les deux sbires chargés de le poignarder, trouvant un autre exilé à sa place, l'exécutèrent.

 
Pammène reparut quelques jours après alors qu'on le disait mort. Sa renommée en fut plus grande encore. Il devint le protégé de Tigellinus, favori de Néron et complice de ses débauches et de ses crimes.

 
Pammène prédit à Tigellinus, cinq années avant que l'événement ne se produisît, qu'un immense incendie détruirait la ville de Rome le 14 des calendes d'août (19 juillet), jour anniversaire de celui où les Gaulois avaient pris et brûlé Rome en l'an 390 avant J.-C. Il lui prédit aussi que Néron, alors en pleine gloire, se suiciderait, abandonné de tous.

 
Statilia Messalina, dite Messaline la jeune, maîtresse de Néron, épouse d'Atticus Vestinus fit interroger Pammène sur son destin. Il lui prédit qu'elle épouserait Néron après l'assassinat de son mari.

 
On consulta les livres de la Sibylle de Cumes (livres sibyllins) et d'après leur réponse, on fit des prières publiques à Vulcain, à Cérès, à Proserpine.



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